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les contributeurs

C'est Pierre qui en a eu l'idée : passer en revue ceux qui ont contribué de près ou de loin, voire à leur insu à la naissance d'Italic et qui continuent de le faire vivre...Des vrais gens d'abord, mais aussi des structures, des lieux, des idées qui sont le produit de rencontres, d'expériences humaines. Un inventaire en quelque sorte, peut-être à la Prevert ! En cours
Le festival "Etonnants Voyageurs". "Notre" 1ère édition date de 1997. Nous étions arrivés de Paris,tôt le samedi. Lorsque nous sommes rentrés dans le palais du grand large encore désert, il y avait un type dans le hall et l'on aurait dit qu'il venait à notre rencontre; Il affichait un sourire franc et son regard de travers lui donnait une allure décalée. Il m'a fallu un peu de temps avant de le reconnaître. Je venais pourtant tout juste de finir "Chourmo". En juillet 2000, nous étions curieux de voir qui serait le tout premier client à franchir le seuil d'Italic. Jean-Paul venait de Marseille et nous appris plus tard qu'il était un ami de Jean-Claude Izzo.

Il bel paese
D'Italie en Italic : la distance est étroite, inversement proportionnelle au nombre de kilomètres...
Italic ayant oeuvré
tout l'été
se trouva fort vermoulue
quand septembre fut venu
Pas un seul petit repos,
week end ou un bon resto
Elle alla changer de mine
en Italie sa cousine
lui priant de lui prêter
quelqu'entrain pour subsister
jusqu'à la saison nouvelle
- je m'y rendrais lui dit-elle,
après août, foi de Rital
notre soleil est si pâle.
L'Italie est généreuse
où il brille sans défaut
-Que faisiez-vous au temps chaud ?
dit-elle à cette voyageuse
-Tous les jours, à tout venant,
à manger, ne vous déplaise
-A manger ? j'en suis fort aise
Eh bien : goûtez maintenant...

j'suis VNR ! Dimanche : jour de relâche et autres plaisirs minuscules...

Petit déj' tardif agrémenté de musique et de la lecture des journaux : la grille géante de l'un, la chronique de l'académicien de l'autre, une incursion plus ou moins sérieuse dans le monde qui s'achève par le feuilletage du magazine qui l'accompagne.
Nous ne pouvons nous empêcher de commencer par la page " déjeuner avec"- l' interview d'une personnalité dans un restaurant, addition à l'appui. Il y a quelques semaines, le Monde 2 recevait un écrivain. Pierre me tendit l'article en cachant le nom et la photo pour attirer mon attention sur l'addition à l'en-tête de "Ital", un restaurant italien de Paris. La "melanzane" y est calabraise...Je soupirais déjà; Attends, ce n'est pas tout ajouta Pierre en découvrant la photo.
Ah, j'suis VNR...Michel Le Bris, né à Plougasnou ( je jure : l'info n'est pas de moi de la mais la rubrique repères), de passage chez france Inter pour la prochaine édition d'Etonnants Voyageurs...
D'Ital à Italic, il n'y a pourtant qu'un pas, même si Lorient n'est pas Paris, que les studios de France Inter n'y sont pas...Et la "melanzane" de Pierre y est fameuse !
Quelques numéros avant , Gaetano Veloso se régalait au Brésil, italien toujours, et plus récemment Sanseverino évoquait son rapport à la cuisine, rappelant son origine italienne et sa première activité ( il était cuisinier)...
Sanseverino en concert le 1er mai à Queven.

Après la nouvelle année, le printemps (des poètes), le "joli mois de mai" ...

Rien de tel que L'Ascension pour faire le tour du monde et prendre un peu de hauteur…

Au programme des Etonnants Voyageurs 2005 :

Les Amériques, la vieille Europe rajeunie par des voix métissées venues de Londres(Ma Jian : que faire d’autre qu’écrire dans une ville au climat détestable), de Russie, un dé-tour par l’Afghanistan en passant par la Turquie puis d’un bond l’Inde, la Chine …

Des débats : sur les lieux qui parlent avec un penchant (le notre) pour le Sud, où un géographe peut tout aussi bien être poète qu'un écrivain scientifique.
sur l’utilité d’écrire- le dernier espace de résistance pour Mordillat (qui était à Lorient le 22 nov) et d’autres, sur les livres « fondateurs » -l’Iliade souvent cité, mais aussi crimes et châtiments.
Pourquoi la prose plutôt que la poésie : il y est plus aisé d’y exposer ses contradictions dira Paul Auster qui évoque la part intime en chacun de nous, ce noyau dur qui nous met ,selon lui, sur le même pied d’égalité.
Comment peut-on se construire sans livres demande ce grand lecteur Alberto Manguel, et qu’y laissons nous, en quoi cela change notre vie.
Qui est cet autre- étrange(r) qui écrit ou l’écrivain et son double…
Autant d’interrogations abordées, sous différents angles selon les participants, mais largement partagées.

Et pour aiguiser les sens : les saveurs du monde avec comme découvreur Olivier Roellinger.
La preuve que cuisine et lecture sont intimement liées et procèdent des mêmes mécanismes d’apprentissage et d’appropriation.

Epatants, ces voyageurs !

A lire : Brad Witson, Bruce Murkoff, Percival Everett, Luiz Ruffato, Nicholas Blincoe, Michel Faber, Atiq Rahimi, Andrei Kourkov et aussi Michel del Castillo, Laurent Gaudé, Céline Curiol, Christine jordis, leslie Kaplan, Alberto Manguel, Jean Malaurie, Ma Jian et tous les autres...

Et encore quelques livres
Si j’inaugure la liste avec Big Jim Harrison, dont le dernier livre de Marquette à Veracruz est, dit-on, le meilleur-Un road moovie sur fond de paysages géants à son image, à la taille de son écriture aussi.( « j’écris pour construire un abri à mon âme… » ) Mes préférences vont vers l’Italie -rien de plus normal : l'art de la joie de Giorlada Sapienza, Vita de Melania Mazzucco, prix Strega 2003; et le dernier Camilleri, qui est en fait l'édition du 1er…
Si vous aimez l'humour de Camilleri, alors vous lirez les souterrains de Bologne de Loriano Machiavelli paru aux éditions Metailie, en espérant bientôt la traduction d'autres enquêtes de Sarti Antonio
A propos d'enquêtes,revoici le Sarde Giorggio Todde et son étrange docteur Marini. Sans oublier les romans de Marcello Fois et du calabrais Carmine Abbate
Ces jours-ci sort au cinema l'adaptation de romanzo criminale de Giancarlo de Cataldo.

Une bonne nouvelle : le commissaire Adambsberg et sa mélancolie sont de retour... dans les bois éternels de Fred Vargas

.A propos d'Etonnants Voyageurs, l'édition caraïbe m'a laissée en suspens car à peine arrivés il était déjà temps de partir. Le temps ( qui nous fait tant défaut) d'écouter Patrick Chamoiseau, Edouard Glissant, Franketienne, Edouard Manet ; de rater Zoe Valdes, Jean-Luc Coatelem; de rerouver Jacques Lacarrière, Michel le Bris, Yvon le Men et de glisser quelques mots à Fatou Diome-irrésistible, à Gisèle Pineau ( avec qui j'ai en commun mon métier), d'entrevoir en passant les couleurs flamboyantes, de saisir de ci de là des bribes, des mots et le privilège de nous entretenir avec une grande dame de la poésie : Andrée Chedid.

Le commisaire Adamsberg est de retour et ce n'est pas trop tôt ! Nous étions, en effet, quelques-uns à guetter la sortie du rom'pol' selon les termes de l'auteure Fred Vargas.
Je ne vous en dis pas plus long...

So long, Babe.
Ou plutôt...Cholong. C'est le nom du bourg normand- un gentil village sans histoire jusqu'au "débarquement" de la famille Blake. Une famille américaine sans problème croit-on. Un couple, leurs deux enfants et un chien. Drôle de nom pour un chien, Malavita...Mauvaise vie, en d'autres termes : LCN. Un sigle, un club, un parti ? Vous n'y êtes pas...La notre de chose : la cosa nostra- la mafia quoi ! Je vous laisse en (bonne) compagnie du roman de Tonino Benacquista

Et puisqu'il est question d'Italie, Entre deux mers de Carmine Abate nous promène dans l'âpre beauté de la Calabre.
Le carnet de voyage appartenant à Alexandre Dumas "oublié" à Roccalba, le village où se déroule (en partie) l'histoire, me rappelle une certaine statue au sourire étrusque...

"

De Lorient à Maschito sous "le soleil des Scorta"
Un livre que j'ai lu, pour ainsi dire, d'une traite entre Lorient et Paris.
On ne présente plus l'histoire : un village des Pouilles qui vit à la grâce de Dieu, de son Saint local-Sant'Elia et de son curé...la disgrâce aussi : les Scorta, une famille maudite -disgraziata dont les rejetons ont pour unique ami Raffaele dit Faelucc'...
Et puis je l'ai confié à la garde de Célia-notre fille jusqu’à notre retour, 10 jours plus tard.
Entre temps, nous nous sommes envolés pour Palerme. Le temps de nous perdre dans les ruelles obscures du centro storico, d'y retrouver, par endroits, les traces d'une précédente visite.
Une incursion dans les vignes de nos partenaires viticulteurs, et nous étions déjà loin, à Syracuse dans la douce lumière d'une fin d'après-midi.

...sono venuto à sognare...chanterait Paolo Conte. Je pensais : Et si la vie était ici ?

Syracuse- la grecque qui s'éloigne déjà sous une pluie battante, escamotant le golfe de Catane et l'Etna qui se drape dans un brouillard têtu- pecato.
Le soleil nous a précédé sur l'autre rive- la calabraise, qui nous conduit dans le massif de la Sila, tout en haut d'un village où, par temps clair, les deux mers se révèlent. Nous avons entrevu l'une et deviné l’autre. Pierre m'a portée afin d’atteindre, non pas un point de vue plus élevé, mais la figue la plusd proche qui s’offrait. Un délice.

...sono venuto a pensare...

Une courte escapade le lendemain pour une ultime vision de la mer ionienne, à l’endroit où la Basilicate s’offre le luxe-un des rares- de s’y détourner et nous étions rendus au terme (supposé) de notre voyage.
Maschito. Le berceau de la famille de Pierre. 800 âmes sous la protection de Sant’Elia. Tous les aînés portent le prénom du grand-père Carmine. Ce soir, nous nous rendons chez Carminucc’, le fils d'Antonio que tout le monde connaît sous le nom de Zi' Ucc', dont le "jeune" frère, que son épouse appelle encore parfois Nucc', n'est autre que le père de Pierre...

A qui, à notre retour, nous avons rendu visite avec dans nos bagages quelque chose de précieux : un fragment du soleil des Ciesco...

Florence Aubenas libérée et 75 lignes effacées d'un coup. Psst ! disparues.
75 lignes écrites par Abdelhatif LAABI et qui commençaient ainsi :

Emmurée...

Un texte retiré également de notre vitrine, le coeur léger.






Pourquoi des livres au restaurant ? A cette question, je réponds invariablement que je ne suis pas fan de porcelaine.
D'où les livres. Non pas en devanture, encore moins, comme je l'ai parfois entendu, pour copier une quelconque mode parisienne ( sans renier ce que 25 années là-bas ont induit), pire : à des fins "un brin intello" où même le brin est de trop.
Mais nos livres, comme un avant-goût, une autre manière de dire qui nous sommes.
Rien de présomptueux à cela : une invitation au partage pour qui veut. Nous les avons disposés de sorte qu'ils soient à portée des yeux, sur des cosys chinés chemin faisant : la contribution de la "petite mer" (Morbihan) à la grande bleue.
Italic c'est aussi cela : le mélange des genres. Une sorte de tissage, mieux : de métissage où les livres repoussent les frontières.
Et puis, cuisine et littérature se marient à merveille. Bon nombre d'écrivains le diraient bien mieux, qui sont aussi de fins gourmets.

Rubrique à brac

Si vous m’avez entendu soupirer, c’est que vous avez l’oreille fine, car je ne sais par où commencer.

Rubrique à brac pourrait s’intituler cet espace ou pourquoi pas… beaux-arts et autres racontars Un clin d’œil à l’écrivain Riel, preuve que cette rubrique ne se prend pas au sérieux même si elle ne raconte pas de bobards. J’y parlerai de nos lectures – les récentes et celles qui constituent notre « fonds ». Y figureront en bonne place nos musiques préférées. Et par associations d’idées tout ce qui peut s’y rapporter.


Rubrique à brac donc pourrait s’intituler cet espace, sauf que le temps manque pour l’organiser. Alors ce sera en vrac. De brac en vrac…cela ne surprendra personne : le V pour B se pratique couramment en breton...

Bretons aussi nos cosys transformés en bibliothèques pour l’occasion ! Vous savez ces sortes d'étagères sur pied où venaient s'insérer les lits. Si joliment garnies les étagères : la poupée en coquillages vernis, le nain en plastique tout de blanc vêtu, brandissant la flamme de son cierge, souvenir solennel de la communion du même nom et de sa pièce montée...Et il y avait aussi la tour Eiffel sous son globe et sa neige incorporée, autre souvenir rapporté par la grand'tante. Mais si vous savez bien : celle dont vous deviez supporter les baisers mouillées et son parfum à la violette, et puis les bavardages l'après midi durant.
( toute ressemblance avec ...blablabla...ne serait, bien entendu, que pure coïncidence )
Revenons à nos cosys qui abritaient aussi livres et autres secrets jalousement dissimulés derrière les portes de leurs niches. Et si les secrets se sont envolés, les lectures,elles, sont restées.
Vous l’avez compris, certains occupent une place de choix :
Les Montale(Izzo), Adamsberg (Fred Vargas) me causent “ pirsonnellement ” comme dirait le commisaire Montalbano d'Andrea Camilleri…sicilien à la langue jubilatoire !
Polar : un genre qu’on aime bien, que je ne prétends pas bien connaître, loin s’en faut. Tonino Benacquista tutoie l'autre Tony : Hillerman et les enquêtes du Poulpe*, mais aussi des polars dits régionaux de chez Bargain et liv’édition qui côtoient des romans plus noirs comme les nouvelles sous la direction de G. Alle réunis sur le même cosy t qui réunit des auteurs qui nous-me sont précieux ( M. Le Bris, Y. Le MEN...)
Les Italiens sont présents : c'est évident. Nous avons découvert Erri De Luca à St Malo lors de l’édition méditerranéenne du festival étonnants voyageurs**. Dans un de ses ouvrages, il écrit : « on est étranger à l’endroit même où on est né, la seulement il est possible de savoir qu’il n’existe pas de terre de retour ». Une pensée qui m’a longuement hantée lorsque je préparais précisément ma reconquête de l’ouest.
Mes préférés sont tu, mio et les 3 chevaux.
Je l’associe naturellement à Gianmaria Testa, leur expérience de la vie sans doute. Ce dernier m’a dit aimer aussi son écriture, tout comme il aimait les livres de JC Izzo qui le lui rendait bien pour ses compositions…
Nous avons fait l’acquisition à Sienne d ‘une édition bilingue d’« exercices de style »***, version italienne d’umberto Eco… Ce dernier avec Mario Rigoni Stern, Alessandro Barrico, Eugenio Montale (éponyme du policier d’Izzo) occupent une partie de l’espace. Certains auteurs sont en version originale, hélas, je ne lis pas l’italien !
Les américains de Missoula et apparentés : les 3 “Jim” : Crumley, Harrison, Welsh. J’aime aussi à me promener en terres indiennes.
La canadienne Nancy Huston, l’égyptienne Andrée Chedid qui ont fait de la France leur pays.Fatou diome et Malika Mokeddem .
Elles ont de l'exil une vision commune et singulière : à la fois blessure originelle et chance de (sur)vie et qui les fait écrire dans la langue d'adoption.

Coté musique :


A écouter : Nougaro et sa note bleue, Nolita de Keren Ann, careless love de Madeleine Peyroux.
Parmi les derniers venus dans notre univers musical : A girl called Eddy ou la version féminine de Perry Blake que, tout comme moi vous aimez, bien que (parce-que ?) ses mélodies soient à se tirer une balle dans les 2 genoux...Pour Eddy, un seul suffira !
FIP a selectionné pour notre plus grand bonheur musica nuda de Petra Magoni à la voix lumineuse, accompagnée à la contrebasse par un ancien de piccola orchestra avion travel, Ferruccio Spinetti. A écouter sans modération... Jazz encore : le trio venu du nord : E.S.T. et aussi le bluesie Amos Lee Si vous avez écouté (beaucoup) Crosby, Stills, Nash et Young et avant le Buffalo Springield, alors vous aimerez Ray Lamontagne et son album trouble

honneur aux dames. Stancey Kent, Norah Jones les brunes, les blondes Diana Krall et Lisa Ekdhal ? On aime bien écouter leurs standards. J'ai reçu en cadeau Molly Jonshon et Lila Downs, mexicaine par sa mère, à la voix chaleureuse et profonde comme celle de Cassandra Wilson. Profonde aussi celle de Patricia Barber. A propos d'Amerique latine,Lhasa nous a surpris par son 2nd album.

Gianmaria Testa occupe la 1ère place de notre classement italien. Le plus breton de tous est sans doute le sarde Paolo Fresu. Ces deux là doivent composer un hommage à Ferré, tout comme Manu Lann Huel et Didier Squiban.

A rajouter à notre liste : Stefano di Battista et Flavio Boltro, Daniele Seppe ( qui revisite la chanson traditionnelle du Sud ), Sergio Cammariere, Fabio Spicogliese...La poésie de René Aubry , la sensualité de Gaetano Veloso , la pureté des cordes de la Kora de Sissoko ou de celle qui accompagne la voix de Janice de Rosa , le blues teinté de rock aux couleurs cuivrées de Van Morrison

Nous aimons aussi la chanson française, celle dîte de rue Un style, une mélodie et des mots qui ont du sens... A suivre...







Ecce homo et autres bonts mots du genre... Si Tolkien m'était conté


D’humeur plutôt ludique, mère et fille affairées, devisaient ; la seconde résumant le contenu de son trimestre studieux.
- Calepon peripaten, alla dei peripatein emas ! (en gros : c'est dur de marcher, mais il le faut sur le modèle de Dura lex sed lex très en vogue et qui concerne un certain AL-ex 1er et mis en examen. L'avait qu'à écouter la voix du peuple aussi-vox populi, plutôt que celle de son maître -pathe marconi) déclara-t-elle finement -pour illustrer son propos sur l’origine et l’évolution des langues- de peripatein / se promener que l’on retrouve dans péripatéticien ou partisan de la doctrine d’Aristote qui dispensait son savoir en marchant.
Chemin faisant, mère remarquait que le terme en se féminisant avait perdu sa sagesse. Quid de la sapience qui habitait l’homo du même nom ?

Ecce homo !

Père de fille s’est réveillé un dimanche avec cette idée qu’il ne descendait pas de l’homo Sapiens Sapiens, mais bel et bien de Cro-Magnon. D’ailleurs il le grogna plutôt qu’il ne l’articulât. Mère de fille répondit qu’il y avait déjà quelques décennies qu’elle je le trouvait fort magnon .
Cela résume les dimanches, jours de relâche faits de menus riens, de pensées insensées et de balades égarées, lorsque qu’après une semaine de labeur, le seuil de vigilance frôle dangereusement le degré zéro.
C’est dire l’état de délabrement psychique dans lequel Cro magon et sa mignonne se trouvent, autorisant écarts de langage et lapsus en tout genre où règne la plus grande confusion.
Sûr que les non avertis ne comprendraient rien aux propos décousus que seuls les proches déchiffrent à demi-mot.

Petit précis à l’usage des ornithologues allumés, pardon : éclairés.

- Oooh,, s’exclama Mignonne en suivant du regard le virage gracieux du cormoran : un truc qui vole…
- Euh…un oiseau ? demanda Cro Magnon.
- Oui, probablement, marmonna-t-elle, se demandant ce qui pouvait clocher.
Elle détourna les yeux, rentrant la tête dans les épaules en frissonnant, moins par froid que dans l’attente du choc qui ne pouvait manquer de se produire : car forcément le truc allait se fracasser dans un bruit de ferraille digne d’un personnage de Tex Avery...

…Aie aie aie aie aie…paloma ?*

Cormoran, le mot venait tout juste d’affleurer sa conscience tandis qu’elle se souvenait d’un autre dimanche sur ce même chemin de halage où une détonation les avait fait sursauter. Ils avaient alors assisté à la débâcle : l’envol désordonné de centaines d’oiseaux échappés du bouquet d’arbres de l’autre côté du canal. Bientôt un groupe d’échassiers avait formé une escadrille les survolant à basse altitude :
- ôôôh ! n’avait elle pu réprimer, un vol de … hésitant à prononcer le mot une fraction de seconde, le lâchant dans l’air pur où il ricocha drôlement : Greluches !

…Coucouroucoucou… *

Suspendant leurs pas, saisis par l’incongruité du moment, ils sentaient déjà l’onde qui allait les secouer et les hurlements de rire à venir, tellement violents qu’ils durent se cramponner l’un à l’autre pour ne pas tomber.
Mignonne en eut mal au ventre le reste de la promenade, achevée au pas de course sous une pluie battante.

Les balades du dimanche, même brèves, ont cela en commun : la faculté d’évacuer le trop plein, comme ces formidables éclats de rire.

Comment voyager avec un saumon**

Il arrive encore qu’ils se perdent même avec des avertis.
C’est que Cro Magnon a une sorte de don inné pour cela. Tiens, pas plus tard que la période des fêtes, ils avaient emprunté en famille un circuit fort bien balisé, sûrs de leur fait.
Cro se remettant tout juste d’une méchante grippe, fatiguait. Le soleil déclinant refroidissait l’atmosphère. Il devenait urgent de rentrer par un raccourci qu’on voulut bien leur indiquer après quelques tentatives échouées et de nombreux pas perdus( peripatein etc etc). Le sentier longeait une enfilade élégante de sapins de différentes variétés. Pour un peu, on eut dit la montagne. Le soleil tout à sa révérence n’en finissait pas de rougeoyer.
- “ Le ciel est rouge, le sang a beaucoup coulé ! ”
La citation leur était venue naturellement. Légolas, (ce grand blond aux oreilles délicatement taillées) s’adresse ainsi à Aragorn dans les 2 tours, second volet du Seigneur des anneaux dont les Magnon avaient vu le 3ème et dernier la veille, un rendez-vous familial auquel personne ne dérogeait depuis le début de l’épopée (sauf Cro cette fois, cloué au lit par la fièvre.)

De retour à la maison, Chacun s’activait : qui à ranimer le feu, qui à servir des boissons revigorantes tandis que Cro choisissait parmi sa collection une pipe de bruyère aux proportions parfaites et déjà culottée.
(ma Mignonne, tu t’égares ! D’abord parce-que Cro ne possède aucune pipe et qu’ensuite, dois-je te le rappeler, vous avez cessé de fumer il a 2 ans…)

Fille tirait donc une longue bouffée de sa cigarette et suivant rêveusement le tracé de la fumée, attendait le moment opportun d’interroger père, lecteur de Tolkien accompli.
Elle-même a hérité d’une oreille aiguisée (cependant bien moins que Legolas, le grand blond ténébreux) depuis que, petite, Cro lisait à haute voix Bilbo, dont elle restituait fidèlement le contenu au petit-déjeuner dominical sous les yeux admiratifs de son jeune frère, davantage fasciné par l’univers du livre que par le texte.

Fille, donc, comparait la version filmée au texte original.
Les têtes s’approchaient de l’âtre rayonnant dans un demi- cercle parfait tandis que dehors, l’obscurité grandissait et “qu’ une ombre s’agitait à l’Est ” ( Légolas, encore lui, ses yeux velours voilés par l’inquiétude, visible à la ride qui lui barre le front.)
Evoquant cette scène aux dialogues étourdissants, mais néanmoins difficiles à placer dans la conversation, fille demanda :
- N’est- ce point Galadriel qui prononce ces mots (Galadriel, l’apparition au sourire figé qui traverse le film, évanescente, laissant à penser qu’elle ne se contente pas que du pain elfique ) plutôt que Légolas ? (champion du tir à l’arc toutes catégories)
Père, en exégète, approuva citant de mémoire les paroles : - “ Une ombre s’agite à l’Est : le murmure d’une rumeur sans nom … ”
(quelle classe tout de même. Le sourire énigmatique de Galadriel plana un instant dans les flammes, bienveillant. Un instant, j’ai cru qu’elle nous confiait Elendil sa lumière)
Reprenant leur étude comparée, fille s’inquiéta du choix d’Elrond de détruire l’anneau, signifiant ainsi la disparition des siens.
Père opina du chef lui rappelant le serment de Galadriel :
-Plutôt périr que d’être souris à Saumon ! déclara t-il, ignorant la jolie contre pétrie à mettre, bien entendu, sur le compte de sa faiblesse passagère.
(Totalement fumé, ce Saumon !)

Les rugissements qui lui firent écho et les joyeux propos font encore l’objet d’affinages lexicaux.
C’est ainsi, n’en déplaise à Sauron que fille et mère ont fait leur la devise suivante :

Plutôt périr que sourire à ce fumier de Sauron

Ah mais ! non d’un p’tit Gollum…

* Une chanson admirablement interprétée par Gaetano Veloso dont j’ai fait cadeau de l’anthologie à celui que vous savez...
** Un livre d’Umberto Eco





...Et autres racontars ! Et vous, ce 14 juillet ???

On aurait dit
qu’on s’en allait le cœur léger vers la Rochelle.
Et nos 1ères Francofolies promettaient d’être belles…

On aurait dit
que ce 14 juillet tombait à pic :
Comme une aubaine en ce lundi de fermeture d’Italic

Le 10ème anniversaire de la disparition de Léo et une soirée pour le fêter.
Pour sûr qu’on pouvait compter sur Lavilliers pour l’orchestrer.

Parmi ses invités, il y aurait les Italiens Têtes de bois.
On avait dit qu’on y allait aussi pour ça…

On aurait dit…

C’est ainsi que nous avons pris le chemin…des Monts d’Arrée, accompagnés par la voix de Léo, au retour de Plougasnou en baie de Morlaix, par un dimanche incroyablement chaud.
Sans itinéraire précis, le hasard déciderait.

LA MEMOIRE...

Direction St Michel de Brasparts, un des points culminants des Monts, d’authentiques montagnes et si hautes, dit Patrick Ewen à un public incrédule, que parfois leur cime se perd dans les nuages !
Mais il faut croire qu’aujourd’hui, le ciel a grandi car la chapelle est bien visible et le paysage se découvre à l’envi, dans un cercle parfait. A ses pieds, l’ancien marais en partie recouvert par le lac de Brennilis, le mythique Yeun- les portes de l’enfer dit-on et pas la moindre brume pour souligner l’étrangeté du lieu …
Une très légère brise, la bienvenue dans la touffeur de cette fin d’après midi, exhale les parfums des plantes aromatiques qui se partagent, avec la lande rase, le massif schisteux.

Une visite à la maison des artisans en contrebas afin d’organiser notre soirée et nous voici attablés à l’auberge après avoir retenu une chambre chez l’habitant. Ce soir c’est kig ha fars nous annonce la patronne avec l’accent de ce coin du Finistère (en somme assez proche du mien ).
Une vieille maison restaurée et transformée en gîte, meublée avec soin, à l’ancienne, dont l’épaisseur de la pierre retient la fraîcheur propice au repas qui débute par la soupe trempée, comme il se doit, avec ses légumes entiers.
L’endroit abrite dans une pièce voisine une exposition qui raconte l’histoire du marais et ses légendes, qui se visite au gré des commentaires de nos hôtes. Une visite spéciale croit-on comprendre mais que nous devrons remettre à une autre fois. Car il faut prendre son temps. Ou plutôt le temps -ici tout autre- de bien vouloir se prêter à l’atmosphère de cette contrée habitée depuis fort longtemps par l’esprit pieux au sens breton du terme, mélangeant sans complexe religion et croyances plus anciennes.
Des lieux qui attirent les mystiques en tout genre à en croire notre finistérienne grand teint, qui, si elle connaît ses légendes, ne s'en laisse pas conter pour autant... Et qui se fâche, nous raconte-t-elle, lorsqu’une visiteuse ose prétendre que la petite chapelle, hors des sentiers battus, dégage des ondes négatives.
Pstt, soupire-t-elle dans un haussement d’épaules, avec son impayable accent, c’est elle oui ! toutes les femmes à certaines périodes ont ce genre d’ondes ! Moi aussi, enfin plus maintenant…
Sa fille fait irruption dans la salle depuis la cuisine pour couper court à ces propos de bonne femme qui ont réjoui plus d’un des convives présents. Du coup, présentation à l’appui, nous apprenons que l’entreprise est familiale: elle et son mari, sa fille son petit-fils aussi…
Les fars égrainés arrivent sur la table : sucré avec des raisins pour le froment, salé pour le sarrasin, à arroser copieusement de sauce aux légumes, nous prévient-on. Le tout accompagnés du kig –la viande: bœuf (chez moi, on n’y met que du porc), lard, saucisson à l’ail, un second plat contient les légumes : carottes, pommes de terre rôties, et choux.
Et si nous faisons honneur aux plats, alors nous aurons mérité le dessert, un duo de gâteaux bretons. Ce ne sera pas de trop ? ai-je demandé à Pierre qui a secoué négativement la tête en attaquant la viande. Les gâteaux seront soigneusement emballés, pour accompagner la tisane nous conseille-t-elle et je me demande comment elle sait que notre locatrice a préparé un assortiment d’infusions pour notre retour…
Mais avant cela, une promenade s’impose. Sur le chemin qui borde le lac où nous parvenons presque à oublier l’ombre de la centrale abandonnée. Le soleil est au rendez-vous, rougissant comme s’il s’agissait du tout premier. Les montagnes alentour semblent posées sur la surface de l’eau que pas même l’esquisse d’une risée ne vient troubler. On se croirait à s’y méprendre en Irlande.
Pas un son, pas un mouvement. Rien.
Rien que l’extraordinaire quiétude d’un paysage livré à l’absence.
Tout entier offert au bon usage de qui veut l’emprunter.
Et puis un bruit a pris corps dans le silence, mettant fin à la rêverie. Un court instant, j’ai cru distinguer le bourdonnement discret des installations de l’EDF avant que la nuée de moustiques avides ne fondent sur nous, nous obligeant à un repli désordonné.

De retour à notre villégiature dans la campagne, les aboiements de loin en loin ont ponctué les heures. Normal, a déclaré Pierre, n’avais-tu pas remarqué la lune pleine. Et moi qui craignais une nuit sans !
A notre réveil : le même bleu que la veille et un thermomètre qui commence son ascension en même temps que les grimpeurs du Tour, à croire les informations.
En attendant l’ouverture de l’écomusée de St Rivoal, nous avons improvisé une marche dans la forêt de chênes, à l’abri du soleil, faisant l’inventaire de tout ce qui manquait : les chaussures adéquates, les provisions en eau et autres reconstituants ; En bref : tout ce qui aurait pu faire de nous d’acceptables randonneurs.
Mais pourquoi de l’ail ai-je demandé ? nous ne sommes pourtant pas dans les Carpates et les korrigans, elfes et autres membres du petit peuple sont de nature aimable, pour peu que l’on le soit avec eux, avec tout le respect dû à leur condition.
Nous avons regagné l’entrée de la maison rurale par une voie quasi royale, à mon effigie je vous prie, mar plij ! Car la chaussée en pleine rénovation était bordée de chaque côté par des dizaines de plots portant le nom de l’entreprise de travaux publics au même patronyme que le mien…Je n’en attendais pas tant !

…ET LA MER.

La traversée de la forêt de Cranou puis du bourg du Faou m’ont remis en mémoire le livre de Philippe Le Guillou : les marées du Faou. Où nous avons fait une pause, le temps d’une collation et d’une brève ondée passagère. Le ciel était de nouveau éclatant à l’entrée de la presqu’île de Crozon et Landevennec assoupi lors de notre visite des ruines de l’ancienne Abbaye et de son musée, fort à propos climatisé !
Je ne sais pas quel motif secret (ou quelle logique à l’oeuvre) m’a conduit jusqu’à ces lieux sacrés mais je pensais en découvrant la beauté du site, que les moines avaient bien raison de trouver dans la nature une raison supplémentaire à leur contemplation. Où l’on apprend que, bien avant l’adoption de la règle Bénédictine, les premiers moines suivaient les enseignements de l’église Celtique, beaucoup plus proche de l’église primitive et fortement imprégnée des rites plus anciens qui se lisent dans l’architecture symbolique, qualifiée plus tard de fruste !

Peut-être ai-je la réponse à ma question et cette promenade, contemplative elle aussi, prend alors son sens : une sorte de quête où le spirituel est en phase avec la nature autour. Autrement dit : les pieds sur terre, mais la tête dans les nuages ou bien la confrontation bien vivace du réel et de l’imaginaire aux contours perméables- rappelez-vous : les portes de l’enfer du Yeun, même s’il s’agit ici du Paradis…

Sur le chemin du retour entre une dernière incursion dans le parc d’Armorique, moins fréquenté que les routes côtières et l’axe familier Quimper-Lorient, je songeais à tout cela, osant, je précise sans prétention, la comparaison entre l’habitacle de notre voiture et le hamac de Daniel Pennac, à mon tour devenue l’écrivain la plus prolifique de l’univers.
Les Francofolies dans tout cela : eh bien ! Il y en aura d’autres. Pour cette fois, on se contentera d’écouter les artistes parler de leurs créations à la radio.

Pour clore ce chapitre, si je puis me permettre, Pierre me tendant un exemplaire du Monde, au lendemain matin ajouta : tu vas rire . Une pleine page sur une promenade en Bretagne,le Yeun précisément…





ST MALO 2003
Nous y étions les 8 et 9 juin.

Et chaque fois, c'est la même sensation de dépaysement ou de "dépaysage" pour reprendre le titre de l'émission de Ph. Bertrand sur France Inter.

JACQUES LACARRIERE parle lui de ses tables de "désorientation" dans le décor presque solennel de la tour des moulins où la poésie a pris ses quartiers comme chaque année sous la direction d'Yvon Le Men.
Et si le terme solennel ne sied pas bien au personnage, la fraîcheur de la pierre dénudée est à l'image de l'ascète qu'il fut au cours de ses voyages. D'ailleurs il ne possède toujours rien et c'est ainsi qu'on le reconnaît dans les rues de St Malo : déambulant les cheveux au vent, et les mains libres. Quelques poésies lues tour à tour par Sylvia Lipa et Yvon Le Men illustrent son propos sur la métaphore dont il dit que plus l'écart est grand entre les objets et plus la poésie a de chances de durer...Et je ne peux m'empêcher de penser au film intitulé " le facteur " où Pablo Neruda initie un pêcheur du sud de l'Italie ( admirablement interprété) à l'art de la métaphore.
"Géographies", le thème de la rencontre, nous promène au travers de ses univers où la Grèce occupe une place de choix.
On y marche sur les théorèmes parfois, dans les îles reculées où la lumière trace des angles parfaits au sol. Rien d'étonnant dit-il qu'Euclide ou Pythagore y soient nés, leur génie consistant à rendre universelle une géométrie locale. Voilà qui me réconcilierait presque avec cette discipline !
Autre rencontre de poids :
MANUEL VASQUEZ MONTALBAN Sans doute connaissez-vous son personnage Pepe Carvalho, gastronome qui brûle ses livres pour se chauffer. L'homme, lui, parle un français parfait où chaque mot est d'une précision remarquable au service d'une vision du monde à 180 degrés.
Nous avons croisé des Italiens :
Carlo LUCARELLI, membre des "13" - des auteurs de polar de la région de Bologne qui se sont beaucoup mobilisés contre la politique de Berlusconi
MASSIMO CARLOTTO, bien qu'absent, dont nous avons rapporté le dernier livre dans lequel il dénonce la corruption en Italie du nord.
GIORGIO TODDE est ophtalmo en Sardaigne, ses romans sont proches de Camilleri...Nous ne pouvions que rapporter son dernier, d'autant que c'est un homme d'une grande bonté.
JEAN NOEL SCHIFANO : a vécu à Naples plusieurs années, "adopté" nous a-il dit par la ville et ses habitants. Naples pour laquelle il a une véritable passion .
A suivre...

Du grand Léo et en italien : Ferré, l'amore e la rivolta. C'est le titre de l'album du groupe, italien comme leur nom l'indique : Têtes de bois...Et il a du en falloir de la ténacité pour le produire. Les chansons sont au nombre de 14, certaines en version originale, la majorité en italien. Un beau travail sur les textes.Je n'ai pas fini d'en apprécier la teneur, mais l'émotion est bel et bien au rendez-vous et quelques titres ne me quittent déjà plus comme non si puo essere seri a 17 anni.







Musique
Au plat du jour succède le vin du mois…
la suite logique, alors ?
l’album de l’année :
La valse d’un jour-il valzer di un giorno
de Gianmaria Testa

Car si le bien manger et le bien boire fondent l’existence d’Italic, l’espace autour donne le ton.
Le décor d’abord : comme une correspondance entre les couleurs dans l’assiette et sur nos murs.
Les livres ensuite : certains de leurs auteurs sont chers à nos cœurs.
La musique enfin : celle que nous aimons.
Gianmaria Testa nous accompagnait déjà quand nous formions le vœu de nous installer en Bretagne et d’y ouvrir ce restaurant qui n’avait pas encore de nom.
Il y a trouvé naturellement sa place, où avec d’autres, il constitue l’âme du lieu.
Ses compositions sont l’œuvre d’un artisan au sens le plus noble du terme et c’est aussi pour cela que nous l’aimons.
Rien n’aurait pu nous faire manquer son concert à Ploemeur en février…
J’aime à croire qu’à force de vouloir les choses, elles finissent par arriver puisqu’il a répondu à notre invitation !
Vous n’en avez donc pas fini de nous entendre en parler, de l’entendre aussi…

http://gianmariatesta.com




Lorsqu’Italic n’était encore que dans nos rêves,
Son nom figurait déjà dans la liste de nos hôtes à venir.
Italic grandissait et Pierre disait :
Il viendra, après tout Marseille et Lorient ne sont pas si éloignées.
J’acquiesçais en songeant il faudra juste un peu de temps.

Mais le temps vient parfois à manquer.

Des excuses qui déclineraient notre invitation,
j’en avais imaginée de toutes sortes :
une partie de pêche qui ne pouvait attendre,
les rayons du soleil qui le retenaient captif,
une juste cause à défendre
ou bien une histoire à finir.Jamais un motif d’une telle brutalité.

A quelques heures de l’ouverture, lorsque je disposais les livres,mes yeux ont croisé son sourire au dos d’une jaquette.

Le temps est bien cruel, ais-je pensé.

Sachez que d’Italic, Jean Claude Izzo est l’hôte permanent.







Annie Billet d’humeur
La critique est éloquente : efficace mais sans âme, à propos des séries policières télévisées en général et l’adaptation de la trilogie de Jean Claude Izzo en particulier.

J’avoue : la perspective d’Alain Delon “ incarnant ” Fabio Montale me fait grincer. Passe encore sa suffisance légendaire -ce sont pourtant les failles de
Montale qui le rendent si humain- mais ses déclarations indécentes eu égard à la famille de l’auteur m’ont consternée.

Alors qui , me suis-je demandé, pourrait interpréter ce personnage ?

Je voyais bien le genre : un type, la cinquantaine bien sonnée.
Les cheveux trop longs où le passage du vent - le mistral sans doute- est encore visible et qu’une main tente en vain d’apprivoiser.
De cette main discrètement racée, à l’élégance naturelle des danseurs de flamenco.
Son corps tout entier occupé à saisir sa ville lui donne l’allure d’un errant qui aurait emmagasiné les saveurs épicées du monde.
Il arpente les quais d’un pas amical, grimpe vers les hauteurs et de son regard en biais traverse la Méditerranée.
Et puis, comme autant de stations pour déguster les choses et les gens, il fait halte chez ses nombreux amis, son sourire en coin en guise de laisser passer…

Cher Jean Claude Izzo, vous manquez tellement.

Mais me voilà réconciliée : Richard Bohringer pourrait interpréter Montale à l’écran et j’espère bientôt la sortie des marins perdus avec Bernard Giraudeau.





Jean Claude Izzo Lecture : L’ail et le basilic.
…/…C’est dans ces gestes, autour de l’ail, que les mondes se séparent. Plus gravement que vous ne pouvez l’imaginer. Rien, en effet, ne s’accorde mieux avec l’ail que le vin, rouge de préférence. Du bandol en particulier, issu du fabuleux cépage qu’est le mourvèdre. Des vins amples, élégants, puissants, gras et aromatiques. L’un et l’autre, à chaque bouchée, poussent l’outrance jusqu’à ses dernières limites. Là où le palais n’en revient pas de tant de sollicitations. Comme de l’ivresse d’un premier baiser. Alors, je dis, contre tous les vampires suceurs de sang, qui volent nos énergies, vident nos cerveaux et assèchent nos cœurs, mangez de l’ail, buvez du vin. Ceci est la vie. Car, pour paraphraser l’écrivain Jim Harrison, sans l’ail et le vin, cela risque d’être difficile de continuer notre chemin, dans cette vie.

J’ai grandi dans l’odeur du basilic. Comme tous les enfants du Sud. Ma mère, quand elle revenait du marché, en rapportait deux ou trois pots, qu ‘elle plaçait sur le rebord de la fenêtre de la cuisine. C’était sa place au basilic.
A l’ombre des persiennes entrebaîllées dès le printemps. J’ai appris, plus tard, que son odeur chassait les insectes. Plus tard, j’ai appris bien d’autres choses encore. Par exemple que, jusqu’à la révolution, le basilic était une plante royale. Il ne pouvait être cueilli qu’avec une serpe d’or, et seulement par une personne de haut rang. Mais j’imagine que les roturiers n’ont pas attendu l’an I de la République pour en émietter les feuilles au-dessus de leur assiette !
Le bon goût et les bonnes odeurs, ça s’acquiert d’instinct, et le basilic, quand on l’a reniflé une fois, on ne peut plus s’en passer. C’est mon cas. Dès que je ne le sens pas dans la maison, il me manque. A la première tomate venue, il m’est nécessaire. Quelques gouttes d’huile d’olive sur les pomodori bien rouges, deux ou trois feuilles émiettées par-dessus un quignon de pain de la veille, frotté à l’ail, et valsez papilles ! Je ne connais pas de bonheur plus simple. Le premier qu’offre le basilic. Les autres vous damneront. Comme tout simplement, repas fini, de tirer les volets sur la chaleur de l’après-midi. Et d’avoir pensé au pot de basilic sur le rebord de la fenêtre de la chambre. Dans l’ombre parfumée de la pièce, la vie devient alors plus simple. Comme le plaisir d’aimer. Soyez sans crainte, ni l’abus de basilic ni l’abus d’amour ne nuisent à la santé.





** etonnants voyageurs 2002

St Malo : plus que jamais contre la xénophobie

A peine débarqués sur le continent africain invité pour la 13ème édition du festival étonnants voyageurs, nous voici immergés, non pas au chœur de la savane, mais dans l’univers de James Crumley à la recherche du bar idéal ! Et tandis que s’achève la rencontre à la terrasse de l’univers, Patrick  Raynal rêve à son tour d’un inventaire de ses bistrots où figurerait en 1ère place le café de son enfance « chez la Blonde » à Gavres dont on m’a fait une description mémorable récemment, suivi de près par le célèbre « Ty Beudeff » de Groix- une institution…

Et l’Afrique dans tout ça, me direz-vous…Eh, Oh ! Pas de précipitation, hein, comme l’expliquera Lucien Gourongextrayant quelques histoires du Mali de sa besace. Et puis, c’est cela aussi le festival que chacun parcourt à son gré : une exposition par-ci, un documentaire par-là. Un échange autour du romantisme entre Aminata Sow Fall et Michel Le Bris. Le café littéraire où les nouvelles voix africaines rencontrent André Brink qui n’a pas pris une ride et continue à traquer les travers du monde…Les dédicaces sur le salon : le sémillant Kofi Efoui qui se souvient d’une bonne copine à Lorient ! Le sage Abdourahman A. Warebi au sourire grave et le brillant Dany Laferrière à l’humour contagieux.

Et puis les femmes. Depuis l’édition Méditerranées de 98, elles semblent plus libres de s’exprimer, la menace est moins grande pour les femmes Algériennes, même si prendre la parole en leur nom propre relève encore de la transgression aux yeux de leur société. Elles évoquent la double culture, une richesse aujourd’hui-un fardeau les premiers temps. L’amour qu’elles portent à la France- à toute la France y compris celle qui les a colonisées. Je ne saurai plus restituer à Maïssa Bey et Souâd Belhaddad leurs paroles respectives- qu’elles me pardonnent- tant elles se font écho. Un peu plus tôt, c’est Fatou Diomeétablie à Strasbourg qui raconte qu’au lendemain du 1er tour des élections, à ses amis qui demandaient si elle serait des leurs aux manifestations, elle répliquait : j’ai suffisamment démontré que j’aime la France, que je vous aime, à votre tour de dire que vous voulez me garder… Son livre intitulé « la préférence nationale » donne le ton. Généreuse Fatou, qui, malgré les menaces de son chauffeur de verrouiller les portières (c’est qu’elle a un train à prendre) se plie de bonne grâce aux dédicaces…
L’honneur revient aux conteurs Lucien Gourong et Ernest Ahippah de clôturer le festival, tandis que Mr Couanau - le maire de St Malo- félicite Jean François Deniau dont le regard aiguisé a entrevu le rayon vert*comme son habit. Maëtte Chanterelle salue et remercie. « c’est l’heure de rentrer au village » déclare Ernest à son voisin- son petit frère- et qui n’est autre que Michel Le Bris !
Et pour finir sur une note de tendresse partagée : le lumineux sourire de Catherine Izzoqui depuis l’estrade où elle a pris place nous fait signe qu’elle nous a vus.

*Le titre d’un de mes textes texte réunissant par le jeu des associations ce curieux phénomène que m’avait rapporté un observateur retour d’une mission en Afrique du Sud et un personnage tiré d’un roman d’André Brink… Et voilà que le hasard, qui se joue du temps, les remet en perspective !)







POULPE FICTION
*Gabriel adressa une pensée muette à Gérard et Maria en franchissant le seuil du restaurant italien. Lorient était bien loin de leur bistrot du XIème et des fameux pieds de porc à la Sainte-Scolasse qui faisait leur renommée.
Il jeta un coup d’œil rapide à la carte que lui tendait le serveur, sachant par avance ce qu’il prendrait. Il hésita pourtant : les polpi le tentaient bien.
Le poulpe justement son surnom. La faute de ses bras, des bras si longs qu’on aurait dit des tentacules qui pendaient parfois gauchement quand il ne savait trop qu'en faire. Ce n’était pas l’avis de Cheryl, encore moins celui de ses ennemis qui, pour d’autres motifs, se souvenaient longtemps de leur étreinte !
Il avait depuis longtemps adopté les méthodes du mollusque : un jet d’encre pour égarer les curieux et pfuitt…il disparaissait sans laisser de traces.

Il commanda des penne all’arrabbiata se demandant si elles seraient aussi enragées que celles de Tonino Benacquista dont il apercevait un livre près du comptoir. D’autres lui étaient familiers : il reconnaissait la couverture d’un roman de Jim Harrison - big Jim, un fameux cuisinier à ses heures, côtoyant la trilogie marseillaise d’Izzo où la bouillabaisse -la vraie- s’accompagnait de bandol. Au moment précis où ses yeux se posaient sur les marins perdus, les premières notes d’une mélodie de Gianmaria Testa résonnèrent comme sorties du livre.
Son regard se concentra sur la mousse légère de sa bière et il décida après la première gorgée que la mode minimaliste avait parfois du bon…





Inter celtique 2002

Guillaume poussa la porte du restaurant qui lui était familier : il y connaissait bien l’envers du décor puisqu’il y avait joué un spectacle quelques mois plus tôt- un exercice plutôt délicat dont il avait éprouvé la difficulté et que je qualifiais volontiers de prouesse, sans même parler de son talent. Il s’installa dans un coin et choisit un livre car il dînerait seul. Alan était arrivé quelques instants plus tôt et tournait le dos à la salle, de sorte qu’il pouvait dans un premier temps passer inaperçu.. Sur le chemin du restaurant, le jeune garçon en voyant les affiches du dernier album d'Alan disait à son père combien il aimerait le rencontrer. Car Jerôme, son écrivain de père, avait fini par céder à la curiosité et venait se rendre compte sur place et en famille que la cuisine rivalisait bien avec l’ambiance du lieu.
Guillaume les salua dès qu’il reconnut la jeune fille à qui il donnait des cours de théâtre. Au bout d’un moment, le dialogue tenant de la déclamation, Pierre décréta que l’on n’était pas sur une scène et les réunit sur une table voisine qui venait de se libérer, offrant ainsi plus d’espace. Et si Jérôme ne s’aperçut pas aussitôt de la promiscuité de son livre *, son fils, lui, n’en revenait pas de côtoyer celui qu’il rêvait de rencontrer. Guillaume fut le premier à quitter les lieux- il était déjà en retard- Les autres…

Ce pourrait être le début d'un roman... "Si on écrit de la fiction, autant que ce soit vrai" (Simon Ortiz). Seulement voilà, je ne sais pas très bien quand cette histoire a commencé : lors d'un certain concert à l'olympia, la veille où Pierre passait son diplôme de cuisinier ou bien sur le chemin du retour à Lorient lorsque Christophe me tendit un polar*-cadeau d'un copain ou bien encore lorsque Mathieu proposa avec Guillaume un spectacle dédié aux femmes...

 ...Les autres s’attardèrent, nous avec bien entendu. Histoire de refaire un peu le monde, de dire nos goûts, de parler de diversité et de convergence musicales, de livres aussi. Bref, une soirée comme on les aime, qui laisse des traces et nous nourrissent…et dont les échos tenaces revêtissent nos murs.

 *cf le menu plus bas composé à l'occasion d'une soirée lecture.







MENU propsé pour une soirée lecture et composé d'extraits de polars

 “Le long des quais, les drisses font chanter les mâts et les noctambules courbent le dos. Le phare balaie paresseusement l’eau noire. Les grues géantes qui veillent sur le sommeil de Lorient baissent la tête ” *

“ Cela faisait des heures qu’il marchait, sans but, allant du cours de la Bôve à la rue de la corderie et reprenant ce même trajet en sens inverse. L’obscurité profonde annonçait déjà une nuit sans lune lorsqu’il se retrouva dans la rue de Rochambeau ” **

A l’instant où il poussait la porte du restaurant, le garçon achevait de prendre ma commande : “-Penne all’arrabiata ? -Oui ! j’ai répondu affamé…Les pâtes brûlantes sont arrivées dans mon assiette. Un délice qui enflamme le palais ” ***

-Et pour le dessert ? demanda Pierre dans sa cuisine tandis qu’il remplissait d’eau une gigantesque gamelle.

“Sa méthode préférée consiste à commencer, toutes affaires cessantes, par faire bouillir suffisamment d’eau pour procéder à l’accouchement d’une ribambelle de bébés ” **** “

-Fais des crèmes brûlées si tu as envie. …Ca allait être un de ces chantiers dans la cuisine ! Au fouet, à cette heure” *****

 * in Zone Mortuaire Kelt & Ricardo Montserrat - Série noire.

** in chef-d’œuvre meurtrier à Lorient Jérôme Lucereau - Bargain

*** in la commedia des ratés Tonino Benacquista - Série noire

**** in le sabre et le virus J.A. Jance -Série noire

 ***** in les larmes du chef Daniel Picouly -Série noire







Annie Février 2001 Raymond Queneau : exercices de style.
***Le principe est simple : une même histoire déclinée 99 fois.
Le narrateur se trouve dans un bus à une heure d’affluence.
Un homme, passablement énervé, attire son attention et son accoutrement retient son regard. Un grand échalas, au cou démesuré, qui porte un chapeau de paille dont le ruban s’est transformé en une tresse ridicule.
Il l’aurait sans doute oublié s’il ne l’avait à nouveau croisé quelques heures plus tard près d’une gare, en grande conversation ; son interlocuteur lui faisant remarquer qu’il manquait un bouton à son pardessus.

La tentation était grande d’y ajouter une ou deux versions…Je n’ai pas respecté rigoureusement les contraintes, même si je ne me suis pas éloignée de l’histoire originale, excepté pour la dernière saynète.

Brezhoneg.
Tous ces gens comme à confes’ à attendre l’autocar, Memes tra !
A l’intérieur un tas d’autres spege pire que des sardines de Quiberon…
Sainte Anne d’Auray ! pourvu qu’il m’envoie à la maison, à temps pour la soupe.
Ma doue ! A qui c’est ce tok là qui s’agite au-dessus des têtes ? Un drôle de chapeau, ma foi, avec un pilhou au lieu d’un ruban ; et son propriétaire : un pichon aussi avec son gouzoug tout treut. O yo, comment il est énervé çu-ci. Un torr-revr tiens ! qui pleure soit disant parce qu’on le bouscule.
Et v’la-t-’y pas que je retrouve l’après-midi même…et en grande conversation mar plij !

L’autre lui parle de son paletot aux boutons a-dreuz. J’avais bien vu, moi, qu’il en manquait un.

A l’arrach’
C’est re-lou : le bus est plein ! Hey ! c’est qui ce que-me qui se vé-ner ? Respect, qu’y dit, respect ! Y s’la pète avec sa casquette…l’a plutôt l’air d’une caille-ra, ouais ! Une fausse casquette, avec une fausse marque…trop con le gars !
Le revoilà plus loin avec un pote à lui : y m’gave avec son blouson nase.

A la manière.
Je le savais à l’instant même où il franchit le seuil : ce type gâcherait mon déjeuner !
Rien qu’à sa manière arrogante d’exiger du serveur la meilleure table, un service dans les meilleurs délais. A la place du serveur j’aurai conseillé le Mac Do…

Déjà il s’installait, se débarrassant de son par-dessus à grand renfort de gestes, et malgré moi je notais qu’il manquait un bouton…J’aurai volontiers évité cet inventaire, mais voilà : il me faisait face. Quelque chose clochait dans sa tenue, la cravate peut-être qui tranchait avec l’ensemble impeccable : elle ressemblait à une sorte de tresse usée. Il avait une tête oblongue, en équilibre sur un cou efflanqué. Une tête à porter le chapeau pensais-je. Le cadre du restaurant aidant, je l’imaginais un canotier vissé sur le crâne, la tresse ridicule en guise de ruban.
Contenant à grand peine un fou rire, je me replongeais dans la lecture du livre choisi parmi ceux mis à disposition. Peut-être devrais-je lui suggérer un titre pour tromper l’attente : ” Exercices de style “ me semblait de circonstance…





 
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